Une nouvelle course s’est engagée outre-Rhin. Avec la possibilité de rembourser l’utilisation d’applications prescrites par des praticiens de santé depuis le début de cette année, les start-up veulent démontrer l’efficacité de leur outil en vue d’une
homologation. Or, l’une des start-up de l’e-santé les plus dynamiques d’Allemagne est… française. Doctolib compte déjà 5.000 médecins allemands abonnés à son service de rendez-vous en ligne et compte doubler ce chiffre d’ici à la fin de l’année.
La licorne tricolore a bien compris l’intérêt du marché allemand, qui est plus vaste avec ses 650.000 médecins, kinésithérapeutes et infirmiers indépendants, contre seulement 500.000 en France. La structure du système de santé allemand
offre aussi un avantage avec ses 150 caisses d’assurance-maladie capables éventuellement d’investir dans l’e-santé. Privatisée depuis une vingtaine d’années, l’assurance santé obligatoire affichait encore en 2018 un excédent de 17,5 milliards
d’euros, avant de plonger dans le rouge pour la première fois en 2019. Juridiquement, ces caisses peuvent investir jusqu’à 2 % de leurs capitaux pour accompagner des applications tierces et elles ne s’en privent pas. La jeune pousse Ada a développé une
application qui établit un diagnostic en quelques clics, grâce notamment à des partenariats avec la caisse AOK ou la Techniker Krankenkasse (TK).
D’autres start-up surfent sur le créneau de l’aide aux patients. Selfapy ou Mindance proposent, par exemple, des programmes pour traiter la dépression ou le burn-out, et éviter ainsi d’attendre un rendez-vous dans les cabinets surchargés des psys allemands. Un créneau porteur puisque Selfapy a levé 6 M€ fin janvier.
Partir ou s’adapter au second marché
Malgré des exemples de jeunes pousses qui s’adressent directement au patient, l’innovation allemande dans la santé numérique se concentre surtout sur un secteur peu visible : le B to B et les solutions administratives pour les hôpitaux et les assureurs. C’est là que se trouvent la majorité des capitaux investis et les deux tiers de l’offre, selon une étude du cabinet Deloitte sur « la numérisation du secteur de la santé ». « La part relative des investissements en capital-risque dans le secteur de la santé numérique est plus faible en Allemagne qu’à l’étranger », relève l’étude. « Le défi en Allemagne est pourtant moins le manque de capital que la possibilité pour les start-up de se développer verticalement », constate le docteur Gregor Elbel, auteur de l’étude Deloitte. Face aux obstacles juridiques dans le secteur médical, « elles cherchent leur marchéailleurs : au Royaume-Uni, aux
Etats-Unis ou dans les pays nordiques». D’autres pivotent pour transformer leurs produits en outils de prévention, faute d’autorisations pour poser des diagnostics ou faire de la consultation à distance.
Apps sur ordonnance
La nouvelle loi allemande devrait donner une impulsion au secteur. La possibilité de remboursement des applications numériques prescrites par les médecins devrait doper leur expansion. Les premières homologations sont attendues à partir de mai et quelques débouchés semblent déjà émerger. Le plus gros marché attendu est celui du suivi des maladies chroniques, diabète et insuffisances cardiaques en tête, mais aussi celui de la surveillance des personnes âgées. Cette dynamique devrait être également soutenue par le gouvernement allemand, qui va injecter 200 M€ par an d’ici à 2024 pour favoriser l’innovation dans ce secteur.
Source : https://business.lesechos.fr/entrepreneurs/actu/0602866539624-le-boom-annonce-des-start-up-de-l-e-sante-en-allemagne-335457.php